La sous-préfecture et les origines de l’arrondissement de Molsheim

Monuments, Zoom sur...

Chef-lieu d’arrondissement à l’issue de la guerre de 1870-1871, Molsheim possède un certain nombre d’édifices de l’époque allemande dont la Sous-Préfecture, située hors les murs, sur les premières pentes du vignoble.

Sous le Reichsland (1870-1918)

La défaite de la France en 1870 provoqua le rattachement de l’Alsace-Lorraine à l’Empire allemand, sous le nom de Reichsland Elsass-Lothringen. Les préliminaires de paix, signés à Versailles le 26 février 1871, définirent le tracé de la nouvelle frontière franco-allemande. Le régime prussien remplaça les arrondissements par des circonscriptions plus petites, les Kreise. Dans le Bas-Rhin, les sièges de l’administration des Kreise furent installés à Erstein, Haguenau, Molsheim, Saverne, Strasbourg et Wissembourg.

Le Kreis de Molsheim avait été formé dès le 7 décembre 1870 par la réunion des circonscriptions suivantes : cantons de Molsheim et de Wasselonne (de l’ancien arrondissement de Strasbourg) ; canton de Rosheim (de l’ancien arrondissement de Sélestat) et partie des cantons de Saales et de Schirmeck (de l’ancien département des Vosges). En 1918, l’administration française respecta le découpage antérieur des circonscriptions, et les anciens Kreise furent transformés en arrondissements.

Établis initialement au premier étage de la Mairie (17, place de l’Hôtel-de-Ville), les services de la Kreisdirektion furent transférés en 1880 dans une maison bourgeoise de la rue Liebermann, acquise par la Ville pour la somme de 36.000 Mk. Cette vaste propriété se compose de deux logis avec dépendances, actuellement scindée en deux parties distinctes (5-7, rue Liebermann) : chacune conserve des chaînages d’angle d’époque Renaissance, bien que les fenêtres aient été refaites au XVIIIe siècle. La dépendance au fond de la cour a été complétée par un pigeonnier à la fin du XIXe siècle, du temps où la demeure servait de résidence au sous-préfet.
Vers la construction d’un bâtiment spécifique

Dès l’automne 1901, Ernest Fuchs – maire de 1886 à 1909 – informe le Conseil municipal des démarches conduites en vue de la construction d’une nouvelle Sous-Préfecture, le manque de place se faisant cruellement sentir dans les anciens bâtiments. Le maire signale que le Département a décidé l’acquisition d’un terrain de 91,12 ares à l’ouest de la ville, au lieu-dit Pulverturm (1, route de Mutzig). Les plans furent confiés à l’architecte départemental Maximilien Metzenthin qui, vers 1906-1909, sera également chargé de l’édification du Tribunal d’instance de Molsheim.

Les devis se montant à 183.000 Mk, on sollicita une participation financière de la Ville, d’autant plus que cette dernière était déjà propriétaire de l’ancienne Sous-Préfecture. Finalement, la majeure partie de cette somme fut inscrite aux budgets 1901 et 1902 du Département, tandis que la commune accepta de verser la recette de la vente des précédents locaux. Les travaux de construction débutèrent dès l’été 1902, et le transfert des services de la Sous-Préfecture à leur emplacement actuel eut lieu au cours de l’année 1906.

Représentative de l’époque wilhelminienne, la résidence du sous-préfet s’élève dans un vaste jardin où se trouvent également le bâtiment administratif et le logement du concierge. L’édifice de style néo-Renaissance comporte deux étages avec balcons et un étage de comble en pans de bois, agrémenté en façade d’un élégant pignon rehaussé des armoiries de Molsheim : la roue de saint Georges, patron de la cité. Les bâtiments ont conservé leur forme originelle, bien qu’ils aient failli disparaître au cours de la Première Guerre mondiale. En effet, le 4 juin 1917, une escadrille d’une dizaine d’avions français survola la ville, larguant plusieurs bombes à proximité de la Sous-Préfecture…
Le résidence du sous-préfet

Dénommé Kreisdirektor de 1870 à 1918, le sous-préfet devint un Landkommissar durant la Seconde Guerre mondiale, chargé d’assurer le service public et les affaires administratives de la circonscription. Il n’avait alors qu’un rôle mineur face au Kreisleiter ou « chef de l’arrondissement du parti nazi », responsable de toute l’activité politique, économique et culturelle du Kreis. Toutes dénominations confondues, pas moins d’une quarantaine de sous-préfets furent en poste à Molsheim depuis 1870, dont neuf au cours des vingt dernières années.

Cependant, la brièveté de son séjour dans la cité ne porte pas préjudice aux missions du sous-préfet qui, sous l’autorité du préfet, coordonne les services déconcentrés de l’État et représente ce dernier dans l’arrondissement. Indépendamment des pouvoirs qui lui sont délégués par le préfet, il possède des attributions propres, telles le contrôle de légalité sur les actes administratifs des communes, des groupements de communes (SIVOM, communautés de communes, etc.) et des établissements publics qui s’y rattachent.

Responsable du maintien de l’ordre, il renseigne également le préfet sur les affaires de l’arrondissement, et met en œuvre la politique du gouvernement en matière économique, en matière de création d’emplois et d’insertion. Enfin, le sous-préfet joue un rôle de conciliation, de conseil et d’assistance auprès des élus locaux des soixante-neuf communes qui constituent l’arrondissement de Molsheim : de Saales à Duttlenheim, et de Wangenbourg à Saint-Nabor.

Grégory OSWALD