Si la plupart des Molshémiens savent situer « le » Camille-Schneider, bien peu d’entre eux connaissent – en revanche – la vie et l’œuvre de Camille Schneider, un homme de lettres considéré comme l’un des animateurs de la littérature régionale au cours du XXe siècle.
Fils du modeleur Edouard Schneider et d’Elisabeth Denni, Camille Schneider est né à Molsheim le 29 novembre 1900, dans la maison paternelle du quartier de la gare. Lycéen à Strasbourg pendant la Grande Guerre, il fit ses études à la faculté de lettres, puis devint lecteur d’allemand à l’université de Poitiers, de 1925 à 1927. Fondateur en 1928 de la Société des écrivains d’Alsace et de Lorraine, il en assura le secrétariat général jusqu’en 1950.
Il enseigna à l’école primaire supérieure de Phalsbourg, où il créa le Cercle Erckmann-Chatrian, et quitta cette ville en 1930. Devenu professeur de lettres à Strasbourg, il partagea ses activités professionnelles avec la littérature : il était l’ami de Rainer Maria Rilke (qu’il invita à Molsheim au cours de l’été 1925) et du Dr Albert Schweitzer (auquel il consacra un ouvrage en 1934).
Chroniqueur littéraire à Radio Strasbourg pendant plus de trente ans, Camille Schneider traita sur l’antenne 1000 chroniques allemandes dans Brücke durch das Buch, et 2300 chroniques françaises dans Chronique du livre d’Alsace. Prix Paul Appell de la Renaissance française en 1930, il obtint le Prix Balzac en 1937, et fut – la même année – délégué de la Société des Gens de Lettres, à Paris, qui lui décerna le grand prix de littérature régionaliste, en 1962.
En avril 1935, il épousa Elsa Madeleine Steinmetz. Replié à Vagniez de septembre 1939 à juillet 1940, il rentra alors à Strasbourg, où il fit paraître – dans l’anonymat – 37 numéros de L’Alsace-Journal Libre, premier journal de la France résistante clandestine !…
Fondateur et animateur des jeunesses théâtrales de Strasbourg en 1946, il entra en 1952 à l’Académie d’Alsace, dont il assura la présidence à partir de 1971. Membre du comité d’honneur de l’Académie Stanislas de Nancy, il a tenu des conférences à Paris, Munich, Coblence, Bâle, Colmar, Saverne, Kehl, Karlsruhe, sur Maurice Betz, Henri Bacher, Albert Schweitzer, Gustave Stoskopf ou Saint-Exupéry.
Il confia également des articles à plusieurs périodiques : Le Nouvel Alsacien, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, Les Annales de l’Académie d’Alsace, Rhin et Moselle, Les Vosges, Saisons d’Alsace, l’annuaire de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Molsheim, etc. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, des essais, des nouvelles, des contes et des poèmes, dont l’anthologie Le Livre d’or de la mère qui amena l’introduction d’une nouvelle solennité dans le calendrier national : la fête des Mères.
Son œuvre littéraire est fortement marquée par la figure de la mère, comme en témoigne un autre livre : Mutter – Der Weg zum heiligen Urquell des Lebens und der Liebe. Cet ouvrage fut écrit en hommage à sa propre mère qui n’avait pas ménagé ses efforts pour que son fils puisse réussir, malgré le décès prématuré de son père. Lorsqu’il devint enseignant, Camille Schneider demanda à ses élèves de composer des poèmes et de réaliser des bricolages à l’attention de leur maman. Cette initiative – qui ne connut d’abord qu’un écho régional – fut récupérée par la suite par le régime de Vichy, pour devenir la fête des Mères telle qu’elle existe encore aujourd’hui.
Titulaire de l’Académie des provinces françaises, il avait été nommé observateur permanent près le Conseil de l’Europe pour les questions du droit d’auteur. Chevalier de la Légion d’honneur en 1961, il fut également commandeur dans l’ordre des Palmes académiques, mais aussi Médaille d’or des villes de Renchen, Bade, et de Bordeaux. Ainsi, les pouvoirs publics avaient reconnu les mérites d’une personne, déjà titulaire de la Croix de guerre 39-45 et de la Croix du Combattant volontaire de la Résistance.
Décédé à Strasbourg le 7 août 1978, Camille Schneider avait été promu Citoyen d’honneur de Molsheim dès 1972 « en considération des bienfaits particuliers prodigués à la Ville dans le cadre de ses activités littéraires et culturelles ». Enfin, le L.E.P.I.C. de l’avenue de la Gare fut nommé Lycée Camille-Schneider en avril 1985, permettant ainsi à sa ville natale de se souvenir d’un homme qui a marqué le monde culturel alsacien un demi-siècle durant.
Grégory OSWALD